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    Danseuse Kabyle

    J’ai écrit cet article en 2008, à l’occasion des 10 ans du décès du chanteur. Je l’ai publié au format PDF dans un cercle privé à tous ceux qui se sentent proches des questions d’identité culturelle ou ethnologique, et je le reproduis sur Facebook aujourd’hui. Pour que le combat de Matoub perdure ; pour donner le courage aux Basques, aux Bretons, aux Catalans, aux Cornouaillais, aux Corses, aux Flamands, aux Kabyles bien-sûr, aux Kosovars, aux Irlandais – et à tous ceux qui ne satisfont pas l’exhaustivité de la liste – de faire perdurer leur combat pour leur liberté identitaire face aux ravages de la colonisation ; et de la mondialisation, sa conséquence logique.

    Le printemps Berbère

     

     

    Le drapeau berbère


    Cette histoire commence le 10 mars 1980, à Tizi-Ouzou (du Kabyle Tizi N Wezzu, qui signifie « col du genêt »), une conférence de l'écrivain Mouloud Mammeri (sur la poésie kabyle ancienne) devait être donnée mais elle fut annulée pour des raisons floues. Les politiciens responsables de cette décision, les chefs de la Wilaya (sorte de département) ne donnent aucune explication mais on la maladresse d'évoquer "un ordre venant de l'Etat".


    La conséquence est inévitable. Dès le lendemain (le 11 mars), les grèves dans la capitale (Alger) et en Kabylie, ainsi que des manifestations à Tizi-Ouzou se déclarent.

    Le printemps Berbère commence.

    Le 7 avril, une manifestation importante se met en place à Alger, et les forces de polices la répriment férocement. Il y eut nombre d'arrestations, nombre de blessés. Le même jour, la grève commence à l'université de Tizi-Ouzou. Elle sera prise d'assaut quinze jours plus tard, le 23 avril, par les forces de polices.

    Le 10 avril la grève se généralise et s'étend à toute la Kabylie. Le 17, le président Chadli Bendjedid donne un discours où il déclare l’Algérie « Arabe, Musulmane, Algérienne ».
    Par la suite, le mouvement berbère parvient à faire libérer ses détenus au mois de Juin. Le séminaire de Yakouren se tient au mois d’août, regroupant des militants ou des intellectuels, des sciences humaines notamment. Il a pour objectif de poser clairement le problème de l’identité culturelle algérienne.


    En savoir plus sur le séminaire de Yakouren

    En 1981, des « cours sauvages de Berbère » sont donnés à l’Université Centrale d’Alger et à l'Université de Bab Ezzouar. Leur grande popularité incite le gouvernement à calmer le jeu. Une vague d’arrestation aura pourtant lieu, incarcérant 22 étudiants jusqu’au 19 mai où, à Béjaia un soulèvement massif des militants aura lieu.

     

    Manifestation à Béjaia

    L’Algérie aujourd’hui

    L'arabisation intensive de l'administration algérienne n’est pas sans me rappeler quelques questions linguistiques et culturelles d’Europe. Après presque trente ans de combat, le Tamazight n'est toujours pas reconnue comme langue nationale de l'Algérie. De maigres progrès voient toutefois le jour : Le premier ministre algérien d'origine kabyle, Ahmed Ouyahia, et quelques députés ont prononcés des parties de leurs discours en tamazight. De plus, la langue tamazigh est étudiée dans les établissements scolaires primaires et secondaires, et sera même en examen de BAC, mais seulement en Kabylie.

    Matoub Lounès

     

     

    Matoub Lounès



    Engagé dans la revendication identitaire berbère, Matoub Lounès est un poète Kabyle. Il nait à Taourirt Moussa Ouamar le 24 janvier 1956 et meurt assassiné sur la route d’At Douala le 25 juin 1998. Officiellement, sa mort est due au GIA mais vraisemblablement par des milieux proches du pouvoir.
    Il publie son premier album en 1978. Criblé de balles par un gendarme en 1988, enlevé par les islamistes en 1994 et libéré par un gigantesque mouvement populaire, il est le chanteur le plus populaire de Kabylie.

    Cet enlèvement du Groupe Islamique Armé est du à la féroce opposition de Matoub à l’Islamisme et le terrorisme islamique. Aussi, il s’avèrera facile pour le gouvernement d’accuser le GIA dans la mort du poète. Cela s’avèrera plus facile encore lorsque le Groupe Islamiste revendiquera l'embuscade cinq jours plus tard (30 juin 1998).

    Il reçoit le Prix de la mémoire des mains de Danielle Mitterrand en 1994, et le Prix de la Liberté d'expression, par le S.C.I.J.(Canada) en 1995.
    Il participe à la Marche des Rameaux en Italie pour l'abolition de la peine de mort en 1996.
    En 1998, il sort l’album Tabratt i l
    ukem (Lettre ouverte aux...) dont la chanson éponyme est construite en Kacide (succession de morceaux différents). C’est sur ce même album que le dernier morceau, une parodie de Kassaman, lui coutera la vie.

    En 2001, Le groupe Canta u populu Corsu propose une chanson hommage dans leur album Rinvivisce.

     


     

    Un débat avec Matoub (en français)

     

     

    Mes sources


    Malika Matoub,Matoub Lounès, mon frère, Editions Albin Michel, 2000

    eurominority
    tamazgha
    afrique du nord

    A mes camarades de la revendication identitaire. Pace e salute.


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